Vouloir tenter de restituer un univers sonore, avec des instruments de l'Antiquité et à fortiori gaulois, n'est pas chose aisée, vu le peu de sources dont nous disposons. La seule représentation connue d'une lyre gauloise se trouve sur la stèle de Paule (Côtes d'Armor) elle est datée aux environs du deuxième siècle avant notre ère.
La stèle représente un personnage, certainement un barde gaulois identifiable à son torque (ce collier caractérisant les Celtes ne faisait plus partie de la panoplie funéraire des Gaulois de l'époque de la guerre des Gaules, mais il était toujours largement présent dans la statuaire) portant sa lyre contre son torse.
Cette représentation somme toute assez fruste ne nous permet pas d'avancer des hypothèses très poussées sur la conception et la fabrication de cet instrument. D'autant plus que le personnage semble tenir la lyre à l'envers.
Des tentatives de reconstitutions ont vu le jour depuis sa découverte.
Celles de Jean-Claude Condi et de François Moser par exemple qui évoque l'idée d'un chevalet mobile étant représenté par cette barre transversale, dont JC. Condi en fait une sorte de capodastre...
Dans tout les cas nous ne saurions affirmer que la seconde et plus valable que la première tant que d'autres découvertes archéologiques ne viennent apporter
de nouvelles données...
Depuis longtemps l'envie de reconstituer une lyre gauloise me hantait. En fait d'une lyre deux furent fabriquées !!!
Ce projet n'aurait pu voir le jour sans ma rencontre avec Florent Duffait, menuisier ébéniste, sculpteur et passionné de lutherie et de musique ancienne. Notre collaboration a permis la réalisation de deux instruments archéocompatibles par leur morphologie ainsi que le choix des matériaux utilisés (table d'harmonie en bois, la peau serait le matériau de fabrication le plus ancien et le plus étendu géographiquement, donc le plus commun), le premier instrument réalisé par Florent Duffait s'inspire très largement de celle de J-C Condi (silhouette, nombre de cordes). Les deux bras sculptés reprennent des motifs du 4ième siecle av.J.-C en vigueur chez les Celtes.
Le second instrument en revanche est beaucoup plus personnel par sa morphologie et sa conception. Nous aidant des sources grecques, romaines, égyptiennes, mésopotamiennes et considérant le fait de vouloir fabriquer un instrument qui "sonne", aristocratique ou de musicien professionnel, donc conçu selon des techniques assez élaborées. Nous avons obtenu une lyre/cithare à chevalet oblique possédant quinze cordes et se rapprochant de la kithara grecque ou des grandes lyres du Proche-Orient.
Les plus anciennes représentations mésopotamiennes et mycéniennes remontent à (-3000), ce qui laisse songeur sur les possibilités d'évolution de la lutherie au cours des millénaires suivants...
Je n'affirme en rien que cet instrument est la reconstitution exacte d'un instrument gaulois mais qu'étant donné la maîtrise des Celtes de l'Antiquité dans la métallurgie, l'orfèvrerie, la charronnerie, il serait peu probable qu'ils n'aient su fabriquer des instruments raffinés peut-être de taille conséquente, aux sonorités puissantes, à l'instar des peuples qu'ils ont côtoyé. Dans la mesure où effectivement les anciens Celtes portaient un intérêt au moins aussi important à la musique que les autres peuples de l'Antiquité, ce qui reste à définir...